Le monument El Valle de Los Caidos (La Vallée de Ceux qui sont tombés) a été construit après la Guerre Civile Espagnole, sur ordre de Francisco Franco qui voulait construire un monument afin de perpétuer la mémoire de toutes les victimes nationalistes mortes après la « Croisade Espagnole ». On y trouve actuellement les tombes de José Antonio Primo de Rivera, fondateur de la Phalange , qui a servi de base idéologique au mouvement et de Francisco Franco.
En effet, le monument a été construit par plus de 20 000 prisonniers politiques. Il est également important de préciser qu’il y a les dépouilles de plus de 30 000 victimes républicaines de la Guerre Civile, dont la majorité n’est pas encore identifiée.
Pour la majeure partie de la population, le monument est le symbole de tout une dictature sanglante qui a conduit à une véritable division fratricide au sein du pays. Les blessures du passé ne sont toujours pas guéries , en témoigne encore la popularité du monument ( +82% de visites par rapport à l’an passé) : c’est un monument encore très polémique qui divise la population. La famille de Franco et ses nombreux soutiens comme la Fondation Franco luttent pour que les restes du dictateur soient maintenus au sein du monument, alors que beaucoup d’Espagnols, que cela soit la population ou encore de nombreux partis politiques comme le PSOE, militent pour une exhumation des restes de Franco.
Le nouveau chef du gouvernement a pris une décision très forte en Juillet en annonçant son souhait de changer la signification du monument : voilà pourquoi l’artiste Enrique Tenreiro qui a dessiné une colombe rouge sur la tombe de Franco le mois dernier a engendré une grande polémique, soulignant la division interne du pays. Il a notamment crié « Pour la liberté et la réconciliation de tous les espagnols » , montrant la douleur d’une grande partie de la population qui a perdu des êtres chers durant ces années.
Le gouvernement du nouveau chef de gouvernement a pris une décision très forte en Juillet dernier en annonçant son souhait de changer la signification du monument ;
« Un pais que mira al futuro no puede estar en deuda con el pasado ».
Ce sont les mots du chef du gouvernement Espagnol Pedro Sanchez. Il montre ainsi son désir de soigner les blessures du passé, des blessures « ouvertes depuis bien trop longtemps » pour tourner la page. Cependant, Pedro Sanchez a déclaré ne pas croire que le monument puisse être le monument de la réconciliation , tel que le voulait le gouvernement de José Luis Zapatero, en 2007, grâce à la Ley de Memoria Historica. En effet, le chef du gouvernement ne veut pas effacer le passé : pour lui, le monument est le symbole de la violence franquiste , et en ce sens, il ne peut pas être ce lieu de réconciliation.
Le gouvernement souhaite faire du monument un cimetière civil. Pour véritablement marquer les esprits, parier sur l’avenir du pays et éviter que les erreurs du passé se répètent, Pedro Sanchez a montré son vœu de construire un musée de la Mémoire , comme le fit le Chili avec la création du Museo de la Memoria y de los Derechos Humanos, pour pouvoir permettre une réconciliation de la population après la guerre Civile. Le futur du monument est encore indécis : les autorités espagnoles se prononceront le 17 décembre sur l’arrêt de l’exhumation des restes de Franco , comme le demande expressément la famille.
Le souhait de Pedro Sanchez et de son gouvernement symbolise le souhait d’une grande partie de la population civile espagnole, encore marquée par l’horreur de la guerre. Almudena Grandes, grande auteure espagnole, a exprimé son « incompréhension » face au maintien des restes du dictateur depuis de trop longues années. Elle souligne cependant que la volonté politique quasi-unanime de changer les choses est un signe de « l’amélioration sensible de la qualité de la démocratie espagnole ». En ce sens, il est pertinent de souligner les initiatives locales ou régionales afin d’assurer cette cohésion entre les espagnols : la mairie de Valence a décidé d’effacer tous les signes rendant hommage à de grandes figures franquistes au sein de l’espace publique : ce fut une décision très symbolique.
Cette unanimité politique et ces nombreuses initiatives contrastent avec l’attitude de la fondation Franco ou encore des récentes manifestations de Juillet 2018 de plus d’un millier de personnes en faveur de la conservation du monument et de sa signification.
Antoine Moyen