Si nous avons couvert dans l’article précédent les points de vue des différents membres du Quad, il convient à présent de s’interroger sur ce que le Quad pourrait potentiellement devenir à l’avenir et le rôle qu’il pourrait être amené à jouer en Indopacifique comme ailleurs. En lumière de nos analyses précédentes, deux scenarii bien distincts semblent se détacher : en premier lieu, l’évolution vers un « Quad Bloc », militarisé et surtout institutionnalisé en réponse au bloc créé par la Chine. Puis son opposé, avec un « Quad en retrait » qui se refuse à afficher la moindre ambition stratégique et reste strictement confiné à un rôle de présentoir pour les démocraties occidentales. Enfin, nous proposerons un troisième scenario, dont la dimension stratégique serait certes avant tout économique, mais qui bénéficierait de réelles prérogatives pour s’imposer en Indopacifique et proposer une alternative concrète au modèle de développement promu par la Chine.
Dans l’article précédent, nous avons vu comment le Quad s’est formé et sur la base de quels principes. Cependant la méthode à employer pour accomplir ses objectifs fait l’objet d’importantes oppositions entre les pays membres qui veulent en faire une réelle alliance militaire et stratégique face à la montée de la Chine et ceux qui souhaitent maintenir le Quad dans sa forme actuelle et limiter autant que possible les risques d’affrontement. Ce sont ces courants que nous analyserons ici en considérant le point de vue des différents acteurs engagés, volontairement ou non, dans ce débat qui touche au cœur de ce qui fait la particularité de la zone Indo Pacifique.
Le 29 juin dernier, à Madrid, s’est tenu le premier sommet de l’OTAN auquel ont été convié ses puissances partenaires dans l’espace Indo Pacifique. Espace stratégique d’importance capitale pour les Etats-Unis qui le définissent comme s’étendant de la côte Ouest des Etats-Unis à l’Océan Indien, l’espace Indo Pacifique représente plus des 2/3 de l’économie mondiale et englobe plus de 50% de la population mondiale. Son importance se fait d’autant plus grande que les tensions en Europe ont accentué le déplacement du « centre du monde » vers cette zone bien que celui-ci fut déjà bien entamé depuis 1985.